Carlo Vogele, le réalisateur

CARLO VOGELE

La vie étudiante à Paris excite son intérêt pour les films art et essai, les musées, la peinture et la musique classique. Après des cours de dessin traditionnel, il suit une formation à la réalisation de films d’animation à l’Ecole des Gobelins.

Après des stages à Londres et à Bristol, Carlo s’envole pour Los Angeles à l’école Calarts où il réalise son film de fin d’études For Sock’s Sake. Celui-ci gagne le prix du meilleur film de l’école et lui ouvre les portes du studio Pixar. L’expérience est fascinante et édifiante, une plongée dans le processus créatif et le storytelling propres à Hollywood.

De 2008 à 2015, Carlo a eu la chance de contribuer à la création de films tels que Up, Toy Story 3, Cars 2, Brave, Monsters University et The Good Dinosaur. A côté de son travail d’animateur chez Pixar, Carlo a réalisé des courts métrages en stop motion récompensés dans de nombreux festivals et visibles sur son site internet www.carlovogele.net.

Icare est le premier long-métrage de Carlo Vogele.

Note du réalisateur

L’idée du film icare est née lors d’un voyage en Crète où j’ai découvert le fabuleux patrimoine artistique de la civilisation minoenne : des palais labyrinthiques aux fresques flamboyantes, un sens raffiné du design, des créations d’orfèvrerie et de poterie d’une élégance bluffante…

Intrigué, je me suis plongé dans l’histoire de ce monde antique nourri de mystères et de fantasmes. Très vite des noms résonnent dans mes souvenirs, de diffuses notions de mythologie grecque refont surface, des récits isolés se rejoignent :  la vengeance du terrible roi Minos, les amours bovidées de Pasiphaé, la pelote de fil d’Ariane, Thésée qui affronte le Minotaure dans le labyrinthe construit par l’architecte de génie Dédale, et enfin Icare, jeune fougueux qui vole trop près du soleil. Le fait que tous ces personnages mythologiques se croisent, s’affrontent et se déchirent en Crète, dans le palais de Cnossos, m’est apparu comme une révélation.

Très rapidement, Icare s’est imposé comme le protagoniste idéal. Il évite l’écueil d’une énième version de l’histoire de Thésée qui en est traditionnellement le héros. Les récits antiques nous livrant très peu d’indices sur la vie d’Icare, tout restait donc à inventer. La jeunesse du personnage, qui passe de l’enfance à l’âge adulte, offre un excellent arc narratif (et attire la sympathie d’un public petit et grand).

Contrairement aux demi-dieux et aux figures royales, Icare ne connaît qu’une vie modeste et frugale dans l’atelier de son père, il est totalement étranger aux intrigues qui hantent la cour du palais. C’est un rêveur, candide et intègre, dans un monde où règnent orgueil et duplicité.

Raconter l’histoire du point de vue d’Icare signifie alors que le spectateur découvre les injustices et la cruauté des hommes avec le protagoniste. Ce choix m’a permis d’élaborer une lecture personnelle du mythe et de trouver le thème du film : la rencontre du jeune Icare avec le petit Minotaure caché dans le palais. Cet épisode est de notre invention, elle devient le moteur de l’histoire du jeune héros : l’union de deux solitudes, l’amitié de l’homme-taureau qui va inspirer l’homme-oiseau pour prendre son envol.

Ainsi, le mythe d’Icare est abordé non dans sa symbolique classique (la chute d’Icare étant la punition divine de celui qui ose se mesurer aux Dieux), mais dans sa lecture romantique (le jeune idéaliste qui va jusqu’au bout de son rêve en s’arrachant au monde obscur des mortels), l’embrasement final dans le soleil, loin d’être un échec, signe ici l’accomplissement d’une vie sans concessions.

En collaboration avec ma scénariste Isabelle Andrivet, nous avons élaboré un scénario qui raconte la désillusion progressive d’un jeune idéaliste en quête de lumière. Nous avons beaucoup puisé dans la littérature antique et classique pour concevoir la langue et la carrure des personnages mythologiques, nous avons pris soin de scander leurs dialogues, de jouer sur les rimes et la musique des mots, nous avons cherché la poésie des métaphores et le poids des non-dits.

Carlo Vogele